Samedi 27 juin 2015
Loïc Auzolle : « Il manque des taureaux
compliqués pour nous départager»
Le raseteur est en convalescence après sa blessure du 7 juin à Aimargues.
Depuis 12 ans, ilest dans le top ten des hommes en blanc du Trophée des As. Issu des écoles de raseteurs de Vauvert et de Lunel, natif du Cailar, Loïc Auzolle a intégré le Trophée de l’Avenir en 2004. Depuis 2006, il court le Trophée des As pour déjà quatre victoires. Athlétique, adroit, habile technicien, le droitier a attaqué la saison 2015 en tête et la blessure infligée par Mustang de Cuillé à Aimargues, ne remet nullement en question sa carrière. Le raseteur évalue son niveau, enchaîne sur sa vision de la course camarguaise et élargit la discussion. Rencontre avec un trentenaire parfois un peu désabusé mais plus cérébral que son apparence décontractée ne le laisse penser.
Vous avez été blessé le 7 juin à Aimargues. Erreur, fatigue... ?
Rien de cela. Au départ du raset, j’étais un peu en dedans, Mustang de Cuillé m’a déséquilibré en me touchant le pied. J’ai trébuché et il m’a porté un coup de corne de 20 cm dans le muscle de la cuisse. C’est passé pas loin de la fémorale. Ma précédente blessure remonte à 2004. C’est le risque du métier et ça ne remet pas en cause ma carrière.
Vous êtes en tête du classement des As depuis le début de la saison. Vous visez votre 5e Trophée ?
J’étais physiquement très bien même si je manquais un peu de courses et que je traînais une entorse depuis Palavas. Mais 1er, 2e ou 3e au classement ça ne change rien pour moi. Maintenant je rasète pour me faire plaisir et pour ceux qui me font confiance. Je pense prendre mes responsabilités surtout face à certains taureaux. Je préfère faire les rasets difficiles plutôt que de me jeter sur les taureaux faciles. Je regrette qu’aujourd’hui, il n’y ait pas beaucoup de taureaux assez compliqués pour faire la sélection parmi les hommes. Et qu’une partie du public se satisfasse de voir courir devant les taureaux... Et pourtant nombre de raseteurs ont la technique pour...
Justement, votre relation avec le public est fluctuante et, parfois, les sifflets tombent des tribunes comme à Lunel pour Pentecôte. Comment le vivez-vous ?
Les “siffleurs” font plus de bruit que les autres. A Lunel, le public a pensé que je faisais le minimum, seulement pour marquer des points. Alors que non ! Ce jour-là, j’avais mal au pied, je n’ai pas pu faire les rasets que je voulais. Après... le comportement des autres raseteurs influe sur le tien... quand il y a la bourre...
Plus généralement, la technique est de moins en moins appréciée par le public. Il n’y a pas beaucoup de taureaux compliqués, tout le monde peut les raseter.
Au début de ma carrière, je me suis pris la tête pour plaire à tout le monde. Comme ça avait l’air facile pour moi, une partie des spectateurs m’a mal jugé. Aujourd’hui j’ai juste envie de raseter.
Vous avez 30 ans, vous pensez à la fin de votre carrière ?
Tant que j’aurai le physique pour, je rasèterai le plus longtemps possible. Ça va être très compliqué d’arrêter et je n’y pense pas pour l’instant. Même si j’ai des projets professionnels en cours... Comme créer une ligne de vêtements... C’est compliqué, j’en suis juste au début...
Vous dites souvent que le milieu camarguais manque de professionnalisme. Des exemples ?
Oui, plusieurs. Je m’investis au bureau de l’Association des raseteurs et à la FFCC. Et je vois qu’on n’avance pas. On s’arrête sur des détails et les trois-quarts du temps, on met en cause les raseteurs... Alors qu’un des gros problèmes c’est notre statut. Qui n’existe pas. Il faudrait se fédérer, pourquoi pas sous la houlette de l’Association des raseteurs, régler les problèmes d’assurance, de couverture sociale, de formation...
Autre souci, la prise en charge des blessures. Pour ma part, après mon coup de corne à Aimargues, j’ai été baladé de service en service, il a fallu que je me débrouille pour joindre un chirurgien. Heureusement que j’ai pu parler au Docteur Romieux que je remercie d’ailleurs.... Il travaille à la mise en place de vrais pôles d’urgence pour les blessures par corne. Pour l’instant, le seul en place c’est Avignon. C’est compliqué mais cela devrait être obligatoire.
La reprise c’est pour quand ?
La blessure guérit bien. La dernière IRM montre que le muscle n'est pas complètement réparé et il y a un gros hématome profond qui doit se drainer au fur et à mesure. Je pense reprendre peut être vers le 5 juillet mais c'est vraiment pas sûr. Au pire, le 12.
Propos recueillis par
MARTINE ALIAGA
PHOTOS CHRISTIAN ITIER